« Nous sommes sortis du tunnel », nous disait Laurette Onkelinx ce matin à la radio. Nous? De qui veut-elle parler. Des chômeurs qui verront leur droit diminuer dans le temps, des travailleurs qui devront prolonger leur carrière pour satisfaire le marché, des nouveaux pauvres que générera l’austérité? De qui? Evoque-t-elle égoïstement « sa » réussite, « son » budget, « ses » mesures dont elle ne subira pas les effets.
Par cet effet d’homogénéisation laissant croire que « nous » étions tous dans le même tunnel, comme si nous y étions tous rentrés en même temps et que nous en sortions ensemble, celle qui se dit socialiste use des mêmes outils que le patronat et les marchés: l’unité affectée, celle qui nous disait qu’on avait tous trop dépensé lorsqu’il nous fallait renflouer les banques, et qui nous dit maintenant que les caisses de l’État sont vides – sans dire que c’est parce qu’on a renfloué les banques – et qu’il nous faut nous serrer la ceinture.
Il nous faut nous unir pour satisfaire le marché, cette unification qui élude la lutte des classes et cherche à éviter la confrontation et les risques révolutionnaires qui pourraient s’ensuivre. L’Union des Entrepreneurs Indépendants (UNIZO) invite à la non-grève ce vendredi 2 décembre: « en ces temps difficiles, des manifestations qui paralysent l’économie et des grèves sont totalement irresponsables. C’est un très mauvais signal aux marchés financiers et à ceux qui veulent encore investir dans notre pays. » Force de l’idéologie dominante qui fait croire que ce sont les grèves qui paralysent l’économie, mais non les patrons, reprenant la désormais lancinante force transcendante et intangible qu’est le marché, nouveau dieu qui exige sacrifices.
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A.P